Les faits
Un salarié est engagé par l’Office public de l’habitat en tant que responsable plates-formes, maintenance et achat.
Lors d’un entretien annuel, l’employeur fait état d’un certain nombre de griefs et d’insuffisances, tels qu’un « attitude dure et fermée aux changements, à l’origine d’une plainte de collaborateurs en souffrance, des dysfonctionnements graves liés à la sécurité électrique ». A l’issue de celui-ci, un compte-rendu est rédigé et adressé au salarié.
Après avoir travaillé plus de 25 ans au sein de la société, le salarié est licencié pour faute grave, les motifs contenus dans sa lettre de licenciement étant pour partie identiques aux termes du compte-rendu dressé à l’issue de son entretien annuel. Il conteste alors son licenciement devant le Conseil de prud’hommes.
L’analyse des juges du fond
Le Conseil de prud’hommes fait droit à sa demande et considère qu’en application du principe « non bis in idem », l’employeur ne pouvait invoquer les griefs contenus dans le compte-rendu d’entretien pour licencier son salarié.
La Cour d’appel de Besançon, le 7 janvier 2020, confirme la décision de première instance et estime que les termes de l’entretien annuel constituent un avertissement, car « il formulait des griefs précis et invitait le salarié à un changement immédiat de comportement », et jugent le licenciement intervenu comme étant sans cause réelle et sérieuse.
Contestant le caractère disciplinaire des formulations employées lors de l’entretien annuel, l’employeur forme un pourvoi en cassation.
L’analyse de la Cour de cassation et apport
Par un arrêt du 2 février 2022 (Cass. soc., 2 fév. 2022, n°20-13.833, Inédit), la Cour de cassation rejette le moyen soulevé par l’employeur et estime que le document établi à l’issue de l’entretien annuel constitue un avertissement sanctionnant « un comportement considéré comme fautif » et que « les mêmes faits ne pouvaient plus justifier un licenciement ultérieur ».
Le pourvoi de l'employeur est donc rejeté et le licenciement ultérieur basé sur les même causes dit sans cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation avait déjà estimé qu’un courriel adressé par un employeur à sa salariée lui reprochant des manquements et en l’invitant de manière impérative à se conformer aux règles constitue un avertissement (Cass. soc., 9 av. 2014, n°13-10.939).
Par cette décision du 2 février 2022 (Cass. soc., 2 fév. 2022, n°20-13.833, Inédit), les juges étendent donc leur position aux entretiens annuels en ces termes "son compte rendu d’entretien, l’employeur reprochait au salarié son attitude dure et fermée aux changements, à l’origine d’une plainte de collaborateurs en souffrance, des dysfonctionnements graves liés à la sécurité électrique et le non-respect des normes réglementaires, et l’invitait de manière impérative et comminatoire et sans délai à un changement complet et total, la cour d’appel en a exactement déduit que ce document comportant des griefs précis sanctionnait un comportement considéré comme fautif et constituait un avertissement, en sorte que les mêmes faits ne pouvaient plus justifier un licenciement ultérieur."
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